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Chagrin

             Il tire sur ma jupe, moment d'impatience. Le vent glacial fouette nos visages, la chandelle au nez, il me jette un regard inquiet, presque suppliant. J'entends à peine son murmure. Mes yeux me brûlent, la corde est haute, il se met sur la pointe des pieds et me passe les épingles. J'ai les doigts gourds même si le ciel a la couleur de l'été.

             Notre vie est en berne, l'avenir raturé. Pourtant mon ventre est gros et la vie palpite en moi.

             Une goutte s'écrase sur son front, il sourit et invente une chorégraphie gracieuse. D'un geste solennel, il me tend la pince à linge, puis recule d'un ou deux pas, slalome entre les petites mares qui se forment à nos pieds. Le linge s'égoutte ,impassible, cruel. Luigi recueille ces larmes au creux de ses mains potelées, il renifle.

                                                                                                  (.../...)                              © Marie-Line Musset

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